
Il reste 24 heures pour trouver une manœuvre dilatoire, qui offrirait un délai à la majorité.
1Quelles décisions ont-elles été prises en conférence des présidents à la Chambre ?
Mardi midi, la conférence des présidents de la Chambre, réunissant les chefs de groupes, s'est déchirée : tous les partis flamands y ont exigé l'inscription de BHV à l'ordre du jour de la séance plénière de jeudi, tous les partis francophones s'y sont opposés. Au nom du gouvernement, le vice-Premier ministre Didier Reynders (MR) a demandé que la Chambre se consacre, cette semaine, à la loi-programme et à la loi portant dispositions diverses et qu'elle s'attelle, la semaine prochaine, au budget 2008. Seul point d'accord entre Nord et Sud : pas de séance plénière ce mercredi.
Faute de consensus en conférence des présidents, les députés devront fixer, eux-mêmes, jeudi, leur ordre du jour, à la majorité. Un scénario se profile : le président Herman Van Rompuy (CD&V/N-VA) proposera son menu : questions d'actualité, prises en considération de propositions de loi et votes sur diverses motions.
Les francophones proposeront leurs amendements – examen de la loi-programme, de la loi portant dispositions diverses et de plusieurs conventions internationales –, et les Flamands « le » leur : BHV ! A examiner d'urgence, pour le Vlaams Belang et la Liste Dedecker. CD&V/N-VA, Open VLD et SP.A-Vl.Pro se limitant peut-être à l'ajouter à l'ordre du jour.
Ce qui reviendrait à reporter le point à une séance ultérieure.
En outre, Vlaams Belang et Ecolo-Groen exigent que le Premier ministre s'explique, vendredi, devant le Parlement sur la situation au gouvernement.
2Que feront les partis francophones ?
Sauf miracle (tout est possible désormais…) d'ici jeudi, ils riposteront à l'offensive flamande d'abord par la technique parlementaire. Ils feront en sorte de bloquer la progression à la Chambre de la proposition de loi sur la scission de BHV.
Comment ?
Trois formules au moins ont été étudiées mardi par les présidents du MR, PS, CDH et Ecolo, réunis l'après-midi à Bruxelles, au cabinet Laruelle. La première (la plus probable) consiste à introduire des amendements (ce doit être le fait de 50 députés au moins), et à réclamer l'examen des textes par le conseil d'Etat, ce qui suspend automatiquement les travaux sur BHV.
La seconde, c'est le conflit d'intérêts. Après la procédure déclenchée en novembre 2007 par la Communauté française, le parlement wallon, bruxellois, la Cocof (l'assemblée des francophones à Bruxelles) ou le parlement germanophone peuvent prendre l'initiative, ce qui neutraliserait le dossier pour 120 jours. Les francophones utiliseraient successivement ces deux instruments : amendements + conflit d'intérêts.
Reste la sonnette d'alarme, procédure de sauvegarde extrême, qui se matérialiserait par une motion signée par les quatre partis au sud. Le gouvernement devrait résoudre le problème BHV dans les 30 jours. Mission impossible ? Certains parlent d'une possible « crise de régime ».
Mais la « riposte » francophone ne se limiterait pas au registre parlementaire : il est sérieusement question, en cas d'« agression » flamande sur BHV, de renvoyer le premier paquet de la réforme de l'Etat à la corbeille (les textes ne sont toujours pas votés), et de signifier aux partis du Nord que, la confiance entre les partenaires étant réduite à néant, et l'accord de gouvernement étant bafoué, il n'est plus possible, dans ces conditions, de négocier le fameux « second paquet » de la réforme de l'Etat, attendu, lui, pour juillet.
Plus de débat communautaire avant 2009 ?
Pari fou : le gouvernement y résisterait…
3Que veulent les Flamands ?
L'Open VLD a une tactique claire : la balle, répète-t-il, est dans le camp du Premier ministre. A lui de proposer une solution, d'obtenir la confiance de tous, y compris de son parti. D'ailleurs, Leterme était d'accord avec l'idée qui circulait depuis quelques jours, et que le VLD a remise sur la table lundi soir : une déclaration du chef du gouvernement à la Chambre, jeudi, annonçant une solution négociée sur BHV pour mi-juillet, dans le cadre du deuxième paquet de réforme de l'Etat ; et pour gagner du temps, une nouvelle procédure en conflit d'intérêts introduite par les francophones.
Cette proposition, acceptée par les francophones et Leterme, a été rejetée lundi soir, par le cartel CD&V/N-VA, après une heure de réunion séparée (Leterme, Beke, Vandeurzen, Van Rompuy, De Wever). Autrement dit : Yves Leterme n'est pas suivi par ses troupes. Plusieurs CD&V le confirment. « Il y a un manque de leadership total chez lui », dit l'un. « Le CD&V est une poule sans tête qui court dans tous les sens », dit l'autre. « Leterme suit le parti, ce n'est pas le parti qui le suit », dit un troisième. La question du leadership commence à se poser dans son propre camp.
Mais au-delà de cette question de personne, que veut le CD&V ? Le lundi matin, il demande, urbi et orbi, aux francophones d'introduire un nouveau conflit d'intérêts, et le soir, il refuse une proposition en ce sens : pourquoi ? Au CD&V, on essaie d'abord de vendre la version : « Nous n'avons pas refusé, c'est le MR qui a dit non. » Version contredite par les autres partenaires.
Alors ?
Plusieurs éléments sont avancés pour expliquer cette schizophrénie. Un : « Le CD&V, qui se sent trahi par les francophones qui n'ont plus recouru au conflit d'intérêts, est dans une logique parlementaire : il faut mettre le dossier à l'agenda, il faut voter. » Difficile d'imaginer qu'il se détourne de cette logique, sous peine de se faire « assassiner » par les nationalistes et radicaux. Au contraire : il devrait demander lui-même la mise à l'agenda de BHV et pourrait pousser au vote sur le fond.
Deux : en acceptant la solution VLD, « le CD&V aurait dû voter contre la prise en considération de la proposition de loi BHV » que ne manqueraient pas d'introduire d'autres députés. Impossible sans perdre la face, dit-on.
Trois : le CD&V est pressé par le temps. « Les élus du parlement flamand ne veulent pas aller aux élections régionales de 2009 sans que BHV ne soit scindé. »
Quatre : l'alliance en cartel avec la N-VA n'arrange rien. « Le CD&V est obsédé par la N-VA : si elle ne marche pas, le CD&V ne marche donc pas non plus. » Or, la N-VA n'est guère prête aux concessions. Ce député CD&V résume la situation : « Jeudi, on va au conflit… »
Cdlt
hobywen (chien de chasse LBAcien piocheur et renifleur)